Pour répondre aux enjeux de demain de la gestion durable et équitable de la ressource en eau, les SAGE bretons se penchent dès à présent sur la réalisation d’études-guides pour appréhender la connaissance fine de leur hydrosystème et anticiper les défis de demain. La dynamique partenariale de la politique bretonne de l’eau amène à proposer un temps de partage de connaissance et d’échanges en phase amont pour faciliter le déploiement de ces études.
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La Bretagne de demain est confrontée au défi de répondre à un enjeu de forte attractivité du territoire dans un contexte de changement climatique. Accroissement de la population, développement des activités économiques, maintien des paysages… autant de questions qui sont liées à la capacité d’accueil de la Bretagne, dont celle de la répartition équitable et la gestion de la ressource en eau. Pour appréhender le fonctionnement de l’hydro-système, se projeter sur son devenir et proposer des solutions de gestion territoriale de l’eau, le SDAGE Loire Bretagne propose un outil dédié : les analyses H.M.U.C.
Pour faciliter le déploiement de ces études qui constituent un outil d’aide à la décision intéressant, mais néanmoins complexe à mettre en œuvre, les partenaires institutionnels de la politique de l’eau en Bretagne souhaitent proposer un temps préalable de partage d’informations et d’échanges avec les territoires de SAGE, qui seront chargé de les mener.
Ce premier webinaire aborde le principe de ces études et analyses H.MU.C, les objectifs visés lors de leur mise en œuvre et le cadre de mise en œuvre de celles-ci.
Ce Webinaire s’inscrit dans le cycle de Webinaires “Appui à la mise en œuvre des analyses H.M.U.C dans les territoires de SAGE bretons” proposé en partenariat avec l’Etat, l’AELB, l’OFB, les Départements du Finistère et des Côtes d’Armor, le CRESEB et la Région Bretagne.
Retour sur les interventions
Enora Keromnes rappelle le contexte d’émergence de ce cycle de webinaire Appui à la mise en œuvre des analyses H.M.U.C dans les territoires de SAGE bretons.
Michèle Vallet reprécise la définition et le contenu d’une analyse HMUC tels qu’indiqués dans le SDAGE et détaillés dans la fiche de lecture dédiée du SDAGE Loire Bretagne*. Les analyses intègrent bien le traitement de l’intégralité des 4 dimensions Hydrologie Milieux Usages Climat et le croisement de celles-ci, pour aboutir à des propositions des CLE qui viendraient proposer des ajustements des dispositions du SDAGE. Ce vaste champs d’étude requiert une préanalyse permettant de faire la synthèse des connaissances disponibles et une concertation sur les objectifs recherchés localement en matière d’adaptation des dispositions du SDAGE (7B).
Vladimir De Lapouge revient sur des notions complexes détaillées dans le SDAGE, et la terminologie employée, et précise les objectifs d’une telle étude et de son analyse, que peuvent être :
- l’acquisition de connaissances sur son territoire
- l’adaptation des valeurs stratégiques de débits relatives à la gestion à l’étiage fixées dans le SDAGE, le cas échéant en période de crise (DOE-POE, DSA, DCR) ;
- l’adaptation du volume d’eau plafond pour les territoires classés en 7B2, c’est-à-dire la capacité d’augmentation de l’enveloppe globale de volumes nets prélevés à l’étiage pour un territoire donné, sur la durée du SDAGE
- la substitution pour les territoires classés en 7B3 ou 7B5 du Volume Minimal Anciennement Prélevé, anciennement utilisé, par le Volume prélevable, qui est le volume pouvant être prélevé en moyenne huit années sur dix en période de basses eaux, permettant de satisfaire aux usages anthropiques et au bon fonctionnement des milieux.
- l’adaptation, dans le cadre d’un projet territorial, de l’encadrement des prélèvements hivernaux en ZRE.
Il précise également les modalités d’’intégration au SDAGE des adaptations envisagées à l’issue de ces analyses.
Jean Placines présente l’approche souhaitée pour le déploiement de ces études en Bretagne et points de vigilance à aborder en phase amont du lancement d’une étude, puis au cours de celle-ci. En particulier, les principes à retenir sont ceux d’une approche concertée, globale (ensemble des usagers), intégrée (ensemble des thématiques), locale (données à l’échelle du territoire).
A l’échelle du bassin, Mathilde Hoareau précise les différentes démarches engagées en matière de gestion quantitative sur les territoires de SAGE, à l’aune du caractère significatif des pressions sur l’hydrologie qu’ils connaissent, et l’état d’avancement de celles-ci.
Typhaine Berthou revient sur l’expérience de la CLE Rance Frémur relative à la réflexion conduite à partir de 2017, ayant conduit à la décision de se lancer dans une étude HMUC, suite à l’identification d’un déséquilibre intrinsèque déficitaire de 2.2 millions de mètres cubes d’eau.
Questions/réponses
Pourquoi faut-il conduire une concertation multi-acteurs dès la construction des cahiers charges des études HMUC ?
La concertation étendue dès la phase préparatoire permet de disposer d’une vision globale des questions se posant en matière de fonctionnement de l’hydro-système à l’échelle locale, de ses usages, de son devenir et d’associer l’ensemble des acteurs compétents.
En fonction des objectifs recherchés via le déploiement d’une telle analyse à l’échelle d’un territoire de SAGE, il est indispensable de solliciter certains acteurs, notamment pour s’assurer de la cohérence des hypothèses de travail retenues au cours des études HMUC avec les prérequis des méthodologies requises d’un point de vue réglementaire pour l’établissement de certaines valeurs guides de gestion de la ressource en eau. En particulier, au vu du rôle dévolu au Préfet coordinateur de bassin en matière de validation des volumes prélevables découlant des analyses HMUC, il est nécessaire de solliciter le plus en amont possible les DREAL et DDTM et d’intégrer leurs éventuelles remarques pour le lancement, et de les associer pour le suivi de ces études.
Comment s’applique la priorisation des territoires pour la réalisation d’études HMUC ou EVP ? Qui finance ces études ?
Pour le bassin, la validation de la stratégie de priorisation pourrait se faire en parallèle de la signature du SAGE, prévue pour mars 2022, afin d’articuler les 2 exercices de planification. Elle dépend aussi de la signature du décret relatif à la gestion quantitative de la ressource en eau et à la gestion des situations de crise liées à la sécheresse.
Par ailleurs, pour la Bretagne, l’étude régionale Gestion quantitative va apporter des éléments plus fins de connaissance, permettant d’identifier des territoires en tension.
L’Agence de l’eau et ses partenaires habituels peuvent cofinancer les études HMUC.
Quel texte de référence encadre l’obligation faire une analyse HMUC en ZRE (Zone de Répartition des Eaux) ?
Même si la Bretagne n’est pas concernée par le classement en ZRE, plusieurs territoires sont classés en ZRE sur le bassin Loire Bretagne. Sur ces territoires en ZRE, il y a une obligation nationale de réaliser une étude des Volumes Prélevables (EVP). En ZRE, il n’est plus possible de demander d’autorisation individuelle de prélèvement : elles sont remplacées par une autorisation unique de prélèvement (AUP), portée par un Organisme Unique de Gestion Collective(OUGC), qui base sa demande d’AUP auprès de la préfecture, sur une EVP. Dès l’obtention d’une AUP, l’ensemble des autorisations individuelles accordées deviennent caduques et toutes les autorisations de prélèvements individuelles en agriculture passent par l’AUP.
D’un point de vue réglementaire, en ZRE, il y a donc nécessité de définir une AUP qui va passer par une étude EVP-HMUC préalable. C’est la réglementation nationale qui s’applique (Code de l’Environnement, modifié par la réforme de la Loi sur l’eau et les milieux aquatiques de 2006). Hors ZRE, il y a une incitation pour travailler sur les volumes prélevables et à s’appuyer sur une étude HMUC.
Au-delà de la définition des volumes prélevables, au vu de l’attractivité du territoire breton et du développement à un rythme soutenu des usages de l’eau, en particulier dans un contexte de changement climatique qui va modifier le régime des apports pluviométriques, il y a un intérêt à conduire ce type d’études pour dresser les perspectives d’avenir, en avance de phase de la gestion d’un déséquilibre quantitatif.
Comment concilier la disparité des hypothèses de projection qui peuvent être prises par les autres acteurs et comment les intégrer dans l’étude HMUC ?
La disparité peut en effet se retrouver à plusieurs niveaux : disparité temporelle, géographique, etc.
Chaque dimension fait l’objet de projections à plus ou moins long terme : 30 à 100 ans pour l’évolution du climat, 10 à 30 ans pour l’aménagement du territoire, 5 à 10 pour l’évolution des systèmes agricoles, etc.
Par ailleurs, chaque échelle de territoire compétent dans un domaine (eau potable, aménagement, économie, …) peut voir émerger des hypothèses différentes de projection : par exemple en ce qui concerne la démographie, la planification des usages du foncier, etc.
Il est cependant crucial d’aller chercher les projections utilisées par les acteurs compétents dans un domaine (acteurs de l’aménagement, de l’économie, etc.) et de les confronter aux projections utilisées par les acteurs de l’eau (fonctionnement hydrologique, milieux aquatiques). D’où la nécessaire concertation et l’approche multi-acteurs.
A ce stade, en l’état actuel de la connaissance disponible et de la capacité à dresser des projections plus ou moins lointaines, il conviendra d’utiliser les meilleures données disponibles de chaque secteur, chaque usage, à confronter les unes aux autres. Le travail de synthèse & d’articulation des 4 dimensions doit permettre de rendre des conclusions pour orienter les décisions politiques de gestion durable et équilibrée de la ressource, le but étant d’éviter le déséquilibre. Il sera donc nécessaire de bien identifier les différentes hypothèses de travail retenues, tout au long de l’étude.
Le traitement spécifique de chaque dimension H, M, U, C est requis, par définition, dans l’étude du même nom. Y a-t-il des clauses indispensables à intégrer dans les cahiers des charges de ces études ?
Le lancement de ces études implique de requérir les compétences d’experts dans les quatre dimensions. Chaque volet est très pointu mais ils sont imbriqués les uns avec les autres.
Il n’y a pas de clause-type à prévoir. Les marchés de prestations intellectuelles peuvent revêtir différentes formes :
- Le recours à un seul prestataire, disposant en son sein, des ressources d’expertise dans les 4 domaines ;
- Le recours à un groupement de prestataire, apportant chaque une ou plusieurs compétences ; la coordination de l’ensemble pouvant être assurée soit par un prestataire, soit en régie, par la structure porteuse de l’étude.
Le retour d’expérience de certains territoires du bassin montre que l’allotissement thématique n’est pas forcément la piste la plus adaptée car si chaque dimension doit être traitée spécifiquement, l’ensemble des dimensions doit ensuite faire l’objet d’un travail de synthèse et articulation.
Est-ce que le Préfet a la possibilité, après avis de la CLE, d’intégrer par anticipation, certains résultats de l’analyse HMUC, et en particulier des nouvelles valeurs de DOE, avant leur intégration dans le Règlement du Sage ?
Cette possibilité laissée au Préfet est mentionnée dans les dispositions 7B2 à 7B5 de l’actuel projet de SDAGE Loire Bretagne. Cela n’est pas mentionné dans le projet de chapeau du chapitre 7 ni dans le projet de disposition 7A2 qui évoquent la possibilité de faire évoluer les DOE/DSA/DCR des points nodaux du Sdage. En l’état de ce projet, pour faire évoluer ces valeurs, il faudra attendre leur intégration dans le Règlement du Sage concerné.