Le projet PRETABAIE est issu des réflexions du groupe scientifique animé par le Creseb en appui au second plan de lutte contre les algues vertes (PLAV2). Le bilan a fait émergé l’intérêt d’une étude préalable pour concevoir un projet de recherche-action visant l’accompagnement de territoires dans la construction de trajectoires de transition agroécologique, nécessaires pour aller vers des solutions durables et systémiques. Cette étude de préfiguration est conduite en vue de dépôt d’un projet de recherche-action auprès d’un guichet de financement.
Table of Contents
- Concevoir un projet de recherche-action pour accompagner des transitions agro-écologiques dans les territoires
- Engager une étude de préfiguration
- Livrables
- Pour aller plus loin
A l’issue du bilan de l’appui scientifique au PLAV2 (2016-2021) animé par le Creseb, le groupe d’appui scientifique a choisi de sortir du strict appui à la politique publique PLAV et proposer de s’inscrire dans une dynamique d’accompagnement scientifique sur un temps plus long que la gestion des questions au coup par coup, et à une échelle plus interdisciplinaire et transversale à l’ensemble des baies. Ainsi, il a souhaité faire évoluer ses modalités précédentes d’appui scientifique en allant vers une approche plus systémique dans le cadre d’un projet de recherche-action, à construire avec les acteurs de territoires.
L’étude de préfiguration PRETABAIE doit permettre à un collectif scientifique de se structurer et s’engager dans cette nouvelle voie qui viendrait alimenter à moyen terme la politique publique PLAV ou des problématiques régionales de transition avec d’autres enjeux environnementaux.
La cellule du Creseb participe à la mise en œuvre de cette étude de préfiguration et s’attachera notamment à accompagner la définition du plan de transfert des résultats du projet de recherche-action, à faire le lien avec les territoires ainsi qu’avec d’autres projets de recherche-action émergeant au niveau régional sur la thématique eutrophisation littorale et/ou transition agro-écologique à l’échelle de territoires.
Concevoir un projet de recherche-action pour accompagner des transitions agro-écologiques dans les territoires
Après plusieurs années de plan d’actions de lutte contre la prolifération des algues vertes et malgré les progrès accomplis, le groupe d’appui scientifique constate que l’accentuation de la pression sur la profession agricole se heurte à des limites socio-économiques et politiques qu’il sera difficile de lever sans une démarche inclusive, fondée sur une adhésion plus large à des projets de territoire prenant en compte les spécificités de chacun d’eux. Dans le même temps, la persistance du problème environnemental contribue au durcissement des rapports sociaux, rendant les mobilisations collectives constructives plus difficiles.
Les résultats des recherches, expertises et évaluations menées depuis 2010 montrent que l’atteinte des objectifs de réduction des flux de nitrate et de réduction de biomasse algale visés par les politiques publiques, oblige à reconsidérer en profondeur les formes d’intégration de l’activité agricole dans les territoires touchés, qu’il s’agisse des systèmes de production, de la conduite et de la structure des exploitations, des infrastructures paysagères. Cet ancrage territorial se doit aussi d’inclure une approche économique intégrant le contexte de la politique agricole commune, le rôle des filières agricoles et agro-alimentaires ainsi que les problématiques foncières ; et ceci en cohérence avec d’autres objectifs de transition que peuvent porter les territoires aujourd’hui (alimentaire, environnementale, sociale, …).
Afin d’apporter son appui à la co-construction vers ces transitions allant au-delà des leviers classiques de réduction des fuites de nitrate, le collectif scientifique considère nécessaire de co-construire les bases d’un projet de recherche-action qui permettrait de :
- renforcer la capacité des acteurs opérationnels à concevoir les scénarios envisageables pour infléchir les trajectoires dans leurs territoires,
- nourrir l’expertise des scientifiques,
- alimenter à moyen terme la politique publique de lutte contre les marées vertes.
Un tel projet de recherche-action devra relever des défis d’ordre scientifique et des défis à l’interface science-société (place des scientifiques dans la gouvernance d’un socio-écosystème en tension). En effet, la gestion des algues vertes est un problème de société complexe qui requiert un dialogue entre sciences naturelles et sciences humaines et sociales, en vue de puiser dans chacune des disciplines mobilisées par le sujet, les concepts et outils qui permettraient de construire une vision globale et complémentaire des solutions à y apporter. Il devra également s’appuyer sur l’implication des partenaires concernés, en particulier les porteurs des actions de protection de la qualité de l’eau aux échelles régionale et locale, pour définir ou affiner les questions de recherche, choisir la méthodologie, recueillir les données, choisir les critères d’évaluation, interpréter les conclusions, élaborer les messages clés et diffuser les résultats.
Engager une étude de préfiguration
Un tel projet de recherche-action nécessite un montage minutieux, en co-construction avec les parties prenantes, afin d’identifier les compétences et les ressources nécessaires à la bonne conduite du projet, de préciser les questions de recherche, définir les résultats attendus et leur transfert, évaluer les conditions de faisabilité et de mise en œuvre du projet de recherche-action et identifier les guichets de financement potentiels.
Pour assurer cette phase de conception, le groupe d’appui scientifique a engagé une étude de préfiguration dénommée Pretabaie (Préfiguration d’un projet de recherche-action sur la Transition Agro-écologique des Baies à marées vertes), articulée autour des volets suivants :
- Préfiguration d’un consortium de recherche scientifique et identification des enjeux scientifiques ;
- Co-conception des questions de recherche du projet avec les territoires et partenaires concernés (porteurs locaux des projets de territoires, acteurs institutionnels, acteurs socio-professionnels) avec le souci du contexte dans lequel évoluent les utilisateurs potentiels et de la transférabilité du projet pour que d’autres publics de même nature puissent s’en saisir ;
- Structuration et description de l’organisation des actions et des résultats attendus, évaluation de la faisabilité du projet ;
- Définition de la stratégie et des modalités de transfert des connaissances apportées par le projet de recherche au fur et à mesure de son déroulement ;
- Dimensionnement des moyens du projet et identification de guichets de financement auprès desquels pourrait être soumis ce type de projet de recherche-action.
Bénéficiant d’un financement de la Région Bretagne, une ingénieure-projet, Odeline Billant, a été recrutée pour un an à partir du 1er mars 2023 au sein de INRAE (UMR Sas) et en collaboration avec le CNRS-UBO (UMR Amure). L’étude a été pilotée par des scientifiques issus de l’ex-groupe d’appui au PLAV 2 et accompagnée par la cellule d’animation du Creseb qui apporte son appui au déroulement de l’étude, plus particulièrement pour les relations avec les porteurs locaux et régionaux du PLAV et pour le transfert et la valorisation des résultats.
Des liens ont été faits avec le projet de recherche scientifique GreenSeas “Adaptations des systèmes socio-écologiques côtiers vulnérables à l’eutrophisation” (ANR, 2023-2027) qui développe des analyses complémentaires (approches rétrospectives) à celles envisagées dans un futur projet qui émergerait de PRETABAIE (approches prospectives).
Livrables
Rapport final
Le rapport final se veut un jalon posé pour que l’émergence d’un projet de recherche-action soit facilitée lorsque les conditions seront réunies (consortium scientifique, guichet de financement, co-construction avec des territoires candidats,…). Il est structuré en 4 parties :
Contexte de réalisation de l’étude
La première partie de l’étude présente le contexte dans lequel elle s’inscrit. Est ainsi souligné le caractère sectoriel des recherches menées sur les territoires algues vertes depuis plus de trente années. Ces recherches, souvent ancrées dans les territoires touchés et construites en interaction avec les opérateurs locaux, sont aussi marquées par des rapports avec les politiques publiques souvent caractérisés par une différence de vision sur le devenir des territoires concernés (1.1).
Ainsi, PRETABAIE émerge de la volonté du groupe de scientifiques de dépasser le cadrage centré sur l’azote promu par les politiques publiques : il ne s’agit pas de remettre en question le rôle central de la maîtrise des flux d’azote dans la résorption des marées vertes, mais de prendre en compte la dynamique plus globale et au long cours des systèmes socio-écologiques dans lesquels celles-ci trouvent les conditions propices à leur développement (1.2).
La temporalité de réflexion de PRETABAIE est néanmoins particulière. De nombreux acteurs rencontrés au cours de l’étude soulignent la fenêtre d’opportunité que représente le renouvellement de la population agricole, mais regrettent aussi le recul de l’élevage bovin et la difficulté à favoriser l’installation-transmission de jeunes agriculteurs. Du côté de la recherche, les équipes historiquement mobilisées sur la thématique des pollutions diffuses gagneraient à être soutenues par des disciplines peu présentes en Bretagne, telles que l’agronomie systémique, la socioéconomie agricole, les sciences de la conception et de la gestion. Cependant, les conditions de financement d’un large projet de recherche-action sur les transitions agricoles en Bretagne ne semblent pas pour le moment réunies (1.3).
Etat de l’art, enrichi des observés
La deuxième partie de cette étude présente, sous l’appellation des « observés du groupe PRETABAIE », les éléments qui ressortent de la littérature, des échanges avec les porteurs d’enjeux et de travaux antérieurs.
Cette partie permet de démêler les différentes problématiques en lien avec l’accompagnement des transitions agricoles en Bretagne. Il est nécessaire de souligner que le terme « agroécologie » est utilisé par une diversité d’acteurs pour décrire des modèles agricoles très diversifiés, en cours ou à construire (2.1). Si l’accompagnement des transitions agroécologiques est aujourd’hui un objectif de plusieurs instruments d’action publique, le choix de ménager une place à différentes visions, très situées dans un monde agricole polarisé, se traduit par des orientations relativement floues (2.2).
Dans le même temps, les modèles généraux de description des transitions permettent d’analyser, de façon générique, les dynamiques à l’œuvre dans les processus de transition. Ces dynamiques ont des effets sur les modalités d’accompagnement des démarches de changement systémique en agriculture (2.3). Ainsi, la « dépendance au sentier », ou l’inertie des modes de production et des infrastructures en place, joue un rôle déterminant dans la construction de stratégies de recherche-action adaptées (2.4). Cette dépendance aux trajectoires du passé se traduit dans le difficile choix de l’échelle d’action et de la dimension collective et territoriale d’un projet de recherche-action.
Les questions de la place de l’élevage et du partage du risque sont également centrales (2.5). Ces « observés » ont permis de préciser l’approche que nous retenons pour renforcer les recherches-actions en Bretagne (2.6).
Fronts de recherche finalisée de transition agroécologique
La troisième partie de l’étude présente des pistes de recherche-action.
Six dimensions paraissent synthétiser différents enjeux des transitions agroécologiques en lien avec la problématique de la qualité de l’eau : l’alimentation, l’énergie, le travail, le patrimoine, la gouvernance et le foncier. Les combiner permet de questionner comment elles interagissent entre elles, se complètent ou se concurrencent. La “combinaison” des enjeux de l’eau, de l’alimentation et de l’énergie constitue un cadre mobilisateur pour un projet de recherche-action (3.1).
Cinq questions de recherche-action sont ainsi proposées dans ce cadre, accompagnées de pistes d’opérationnalisation (3.2).
Au-delà de l’identification d’un guichet financier (non aboutie à ce jour) et d’un ou plusieurs territoires d’expérimentation, l’identification de questions de recherche-action ne suffit néanmoins pas à réunir les conditions nécessaires à l’émergence d’un projet de recherche-action. Certaines conditions de confiance et de transparence sont également nécessaires, tout comme le soutien à d’autres formes de recherche (3.3).
Recommandations générales
Le rapport se conclut par des recommandations générales (4) qui, comme les pistes de recherche-action, ont été enrichies à la suite des temps de restitution et de mise en discussion de l’étude, organisés en 2024.
Temps d’échanges autour du projet
En mars 2024, après des réunions régulières du comité de suivi et du comité de pilotage, Pretabaie est arrivée à une étape où les scientifiques porteurs de cette étude ont souhaité partager leurs analyses et les enrichir à l’occasion d’une journée de restitution et d’ateliers d’échange réunissant scientifiques, coordinateurs institutionnels du PLAV, élus et animateurs des projets de territoire dans les baies AV. Cette journée a eu lieu à St Brieuc le 15 avril 2024 et le compte-rendu figure en annexe 3 du rapport final. Les échanges ont permis d’enrichir l’analyse et les recommandations, afin d’ébaucher des questions de recherche qui soient à la fois pertinentes, traitables et utiles à instruire pour les acteurs opérationnels.
Préalablement en cours d’étude, d’autres temps d’échanges ont été organisés :
Pour aller plus loin
Depuis 2017, le Creseb a consacré une partie de ses travaux à la problématique Algues Vertes.
Le Creseb anime l’appui au PLAV et accompagne l’émergence de projets de recherche sur cette thématique. De nombreuses ressources documentaires sont également référencées sur son site.